Comment l’innovation promet de révolutionner l’accessibilité dans le métro de New York
Avec plus de 1,5 milliard de passagers par an, le métro de New York est l’un des réseaux de transport en commun les plus utilisés au monde. Et c’est aussi l’un des plus anciens. Il a ouvert ses portes en 1904, bien avant que l’accessibilité aux personnes handicapées ne devienne obligatoire aux Etats-Unis. Malgré les contraintes techniques liées à la construction des stations, la Metropolitan Transportation Authority (MTA) s’engage à rendre le réseau accessible à tous et s’appuie particulièrement sur l’innovation technologique pour atteindre cet objectif ambitieux. Toujours fidèles à notre volonté de partager les bonnes pratiques en matière d’accessibilité, nous vous proposons un focus sur la stratégie adoptée par la MTA pour offrir une meilleure expérience voyageur à tous les usagers du métro new-yorkais.
70 stations de métro plus accessibles d’ici 2024
Le réseau de métro de la ville de New York a été construit au début des années 1900, bien avant que l’accessibilité aux utilisateurs de fauteuil roulant ne soit rendue obligatoire par l’Americans with Disabilities Act de 1990 (ADA). Ceci explique en partie que seuls 25 % des 472 stations de métro de la ville étaient accessibles en 2018. La MTA s’engage cependant à augmenter considérablement ce nombre d’ici 2024. C’est l’un des objectifs du plan Fast Forward, lancé après la déclaration d’un état d’urgence concernant les transports en commun de New York par le gouverneur Andrew Cuomo en 2017. Dans le cadre des améliorations stratégiques, ce plan comprend l’ajout d’équipements d’accessibilité dans 70 stations, ce qui améliorera l’expérience voyageur pour tous les usagers. Ces 70 stations s’ajoutent aux 100 stations prioritaires identifiées par la MTA, déjà rénovées ou en cours de rénovation suivant les normes d’accessibilité. Pour sélectionner les stations prioritaires en termes d’accessibilité aux personnes handicapées, la MTA s’est appuyée sur trois critères : l’importance de la fréquentation, la présence de correspondances et la proximité de services essentiels.
Quels équipements d’accessibilité dans les stations de métro de New York ?
Les stations déclarées entièrement accessibles par la MTA disposent d’équipements d’accessibilité pour toutes les catégories de personnes tout au long de la chaîne de déplacement :
- Pour accéder à la station depuis la voirie : ascenseurs ou rampes d’accès, mains courantes et bandes d’éveil de vigilance devant les rampes et escaliers, portiques d’entrée accessibles,
- Pour acheter des titres de transport : distributeurs automatiques accessibles pour la MetroCard, guichets abaissés à moins de 91 cm,
- Pour accéder aux informations : systèmes d’information voyageur audio et visuels, écrans d’information,
- Pour faciliter l’orientation : signalétique en gros caractères et Braille,
- Pour accéder aux trains depuis le quai : réfection des quais ou comble-lacunes pour réduire ou supprimer l’écart entre le quai et la rame lorsque celui-ci est supérieur à 5 cm verticalement ou 10 cm horizontalement,
- Et des services accessibles : téléphones abaissés avec réglage du volume, téléscripteurs (téléphones textuels ATS), toilettes accessibles dans les stations équipées de toilettes publiques.
Un combat de longue date pour l’accessibilité du métro de New York
Mais le sujet de l’accessibilité pour les personnes handicapées dans le métro de New York ne date pas d’aujourd’hui. En 1973, l’article 504 de la Federal Rehabilitation Act (loi fédérale sur la rééducation) rendait obligatoire la mise en accessibilité de tous les réseaux de transport en commun. A cette époque, la MTA refuse, arguant que rendre le métro de New York accessible coûterait plus de 1,5 milliard de dollars. La société des transports en commun new-yorkais plaide alors plutôt pour la création d’un service de transport spécialisé pour les personnes handicapées. En 1984, après une décennie de combats entre les associations et la MTA, un accord est finalement conclu. Celui-ci modifie les lois sur les transports et la construction de l’État de New York pour obliger la MTA à installer des ascenseurs dans 54 stations.
Le 26 juillet 1990, la loi américaine pour la non-discrimination des personnes handicapées, Americans with Disabilities Act (ADA) est promulguée. Cette nouvelle loi exige alors de toutes les autorités organisatrices des transports qu’elles rendent accessibles l’ensemble de leurs services et de leurs infrastructures. Elles doivent fournir la liste des stations prioritaires auprès de l’Administration fédérale des transports collectifs (Federal Transit Administration) avant le 26 juillet 1992. Cette liste devait s’accompagner des critères utilisés pour sélectionner les stations prioritaires ainsi que d’un calendrier des travaux. Les sociétés de transports publics se sont cependant vu accorder un délai pouvant aller jusqu’à trente ans pour rendre leurs stations accessibles. Pour la MTA, le programme prévoyait de rendre 54 stations accessibles d’ici 2010. Mais en 1994, des modifications sont apportées aux lois sur les transports et les bâtiments publics de l’État de New York. Celles-ci renforcent les obligations, portant ce nombre à 100 stations d’ici 2020. Le programme d’investissement 2020-2024 prévoit de mettre 50 stations supplémentaires en conformité avec les normes d’accessibilité ADA. Ainsi, les usagers handicapés se trouveront toujours au maximum à deux stations d’une station accessible.
Afin d’augmenter le nombre d’ascenseurs, la MTA a entériné début 2021 la loi « Zoning for Accessibility ». Celle-ci consiste à préempter des terrains privés situés à proximité des stations de métro pour y construire des ascenseurs. En échange, le propriétaire du terrain obtient une dérogation aux restrictions concernant la densité de population et a le droit d’augmenter la superficie de ses immeubles.
Entre 2020 et 2021, le nombre de stations conformes aux normes d’accessibilité ADA était de 42 % à Manhattan, 21 % dans le Bronx, 21 % à Brooklyn et 30 % dans le Queens.
Informer et communiquer avec les usagers du métro
Pour coordonner le programme de mise en accessibilité et organiser la concertation avec les usagers handicapés, la MTA a créé un comité de coordination de l’accessibilité du métro de New York (CCC). La MTA attache par ailleurs une grande importance à la formation de son personnel. Les agents doivent être capables de manipuler les équipements spécialisés et porter assistance aux usagers handicapés. La société de transport assure également la formation des usagers et de leurs familles, ainsi que des instructeurs de locomotion, ces professionnels qui enseignent les techniques de déplacement aux personnes aveugles ou malvoyantes. La MTA a formé 775 usagers entre 1995 et 2019. Ces formations leur permettent de gagner en autonomie et en sécurité dans le métro.
La MTA travaille également à l’amélioration des informations sur l’état de fonctionnement des équipements d’accessibilité. Dès 2007, elle commence à publier une liste des escaliers mécaniques et ascenseurs en panne sur son site Web. Elle alloue également un budget annuel de 1,3 million de dollars pour leur maintenance.
L’innovation au cœur de la stratégie de la MTA
La MTA innove en permanence pour améliorer l’expérience voyageur sur le réseau du métro de New York. La station Jay Street–MetroTech, située à Brooklyn, près du MetroTech Center, sert depuis les années 1950 de terrain d’expérimentation pour tester les nouveautés du réseau : nouveaux dispositifs d’éveil de vigilance en 1957, premiers distributeurs automatiques, premières cartes de transport plastifiées qui deviendront plus tard les MetroCards, déploiement d’agents partout dans les stations, etc.
En 2019, cette même station est utilisée pour expérimenter de nouveaux dispositifs d’accessibilité. Véritable laboratoire d’accessibilité, la station comprenait plus d’une douzaine d’équipements, notamment des plaques signalétiques en braille, des tablettes tactiles, des applications mobiles de guidage, des plans d’itinéraires accessibles et une signalétique au sol pour guider les passagers vers les bons itinéraires.
La MTA gère en parallèle le Transit Tech Lab avec le Partnership for New York City (groupement de structures publiques et privées dans le domaine de la mobilité). Le Transit Tech Lab est un programme d’accélération pour les startups qui proposent des solutions aux nouveaux enjeux des transports publics. Cette initiative permet à la MTA et aux autres sociétés de transport public de la région de sélectionner les meilleures solutions innovantes avec un objectif : faire de New York le leader mondial des transports publics.
Chaque année, le Transit Tech Lab lance un nouveau concours de startups pour répondre aux enjeux prioritaires. Cette initiative donne aux entreprises sélectionnées l’opportunité de tester leurs solutions en conditions réelles, et potentiellement de les déployer à grande échelle. En 2020, l’accessibilité figurait parmi les thématiques ciblées par le Transit Tech Lab. Neuf entreprises ont alors été sélectionnées pour collaborer avec les sociétés de transport en commun de la région de New York. Parmi elles, la société Okeenea Digital avec son application de guidage indoor Evelity. Il s’agit d’une solution mobile de navigation qui permet à toute personne d’être guidée pas à pas quelles que soient ses contraintes de mobilité ou limitation fonctionnelles dans les réseaux de transport complexes.
En raison de la pandémie de Covid-19, les tests utilisateurs sur site ont pris beaucoup de retard. L’expérimentation est toujours en cours à la station Jay Street-MetroTech. L’un des objectifs de cette expérimentation est d’évaluer le service rendu par Evelity pour les passagers handicapés ainsi que d’optimiser la technologie de géolocalisation utilisée.
D’autres solutions de navigation indoor ont déjà été testées par la MTA, par exemple l’application NaviLens, basée sur l’utilisation de codes QR en couleur. Cette technologie est toujours en cours d’évaluation sur le réseau de bus de New York pour aider les usagers à localiser les arrêts et savoir quand le bus arrive.
Toutes les initiatives de la MTA témoignent d’une réelle volonté d’améliorer la qualité de service du métro malgré la vétusté des infrastructures. Si la route est encore longue, les progrès sont malgré tout évidents. Et l’expérience montre que l’innovation technologique est l’une des clés pour résoudre les défis de notre époque. La technologie a le pouvoir d’améliorer l’expérience voyageur de tous les usagers sur tous les réseaux de transports en commun.
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