« Bilan des Ad’AP et conseils pour leur mise en œuvre » Brigitte Thorin – Déléguée Ministérielle à l’accessibilité – prend la parole

Lors de la journée de formation Techni.Cités, nous avons eu la chance d’échanger avec Brigitte Thorin, déléguée ministérielle à l’accessibilité. Plusieurs sujets ont été abordés dont un point à à date sur le dépôt des Ad’AP. Nous lui avons aussi demandé quels conseils pouvait-elle donner aux maîtres d’ouvrage pour une mise en oeuvre réussie ! Une interview exclusive.

Bonjour madame Thorin, tout d’abord, merci de répondre à nos questions ! Pouvez-vous s’il vous plait nous dresser un bilan des Ad’AP à ce jour ?

La politique d’accessibilité du cadre bâti est devenue aujourd’hui une réalité avec le déploiement des agendas d’accessibilité programmée (Ad’AP). Un dispositif novateur, un outil de stratégie patrimoniale qui a donné un second souffle au volet accessibilité de la « loi handicap » du 11 février 2005 et du temps au temps en échange d’une réelle évolution du cadre bâti. Il y a clairement eu un effet d’entraînement des Ad’AP dans la mise en accessibilité de notre société.

Je veux rendre hommage ici à la formidable énergie déployée par les services de l’Etat sur le terrain, mais également souligner la qualité de la mobilisation de chacun, l’implication des commissions consultatives départementales de sécurité et d’accessibilité (CCDSA), l’apport essentiel des bureaux d’études en matière d’expertise, et surtout, l’engagement des gestionnaires d’ERP dans la transformation de notre société.

Ce travail a porté ses fruits. Les résultats sont très encourageants : nous approchons du million d’ERP. L’essentiel des ERP du 1er groupe (1ère, 2ème, 3ème et 4ème catégories), soit près de 600 000 ERP, sont donc soit déjà accessibles parce que neufs, construits après 2007 ou plus anciens et mis aux normes, soit entrés dans le dispositif des Ad’AP. De plus, nous avons assisté à une prise de conscience collective : l’accessibilité n’est pas un coût mais bel et bien une opportunité.

L’excellent travail de chacun a porté ses fruits, mais il doit se poursuivre et s’amplifier.

Il nous reste encore à mobiliser, plus particulièrement les gestionnaires des petits établissements, les ERP de 5ème catégorie, nos commerçants de proximité et nos professions libérales dont, pour certains, nous n’avons pas de nouvelles.

Et ils représentent un volume dont on ne connaît pas aujourd’hui l’exacte mesure, contrairement aux ERP du 1er groupe qui font l’objet d’un recensement par les SDIS. Nous estimons cependant que moins de la moitié d’entre eux sont entrés dans le dispositif.

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Aujourd’hui, il est essentiel pour ceux qui n’ont pas encore pu réaliser la mise en accessibilité de leur patrimoine, de s’inscrire dans une dynamique qui, s’appuyant sur les objectifs de 2005 réaffirmés en 2014, vise à rendre à moyen terme notre société totalement accessible.

Si l’on peut féliciter les petits ERP qui se sont, à ce jour, résolument engagés dans la démarche, il nous reste encore à « atteindre » au moins autant, sinon plus, que ceux qui sont déjà entrés dans le dispositif en un peu plus d’un an. Certains sont peut-être déjà accessibles, et il faut qu’ils se manifestent et l’indiquent.

salle accueillant la journée de formationComme vous venez de l’expliquer, la page du dépôt des Ad’AP est presque tournée, vient maintenant le temps de la mise en œuvre. Auriez-vous des conseils à donner aux maîtres d’ouvrage pour aborder cette nouvelle étape ?

Avant de donner des conseils, je souhaiterai remercier les maîtres d’ouvrage d’être rentrés dans ce dispositif, c’est la preuve d’une vraie volonté politique de mettre en accessibilité des biens et services.

Aujourd’hui, le plus difficile reste à faire puisque l’Ad’AP reste un engagement à réaliser des travaux d’accessibilité selon un calendrier et à y consacrer un certain volume financier. Il faut maintenant activer sa mise en œuvre. 80% des Ad’AP sont d’une durée inférieure à 3 ans mais certains Ad’AP pouvent courir sur les 6 voire les 9 prochaines années, il va donc falloir garder l’énergie sur cette durée.

Conseil N°1 : sachez vous entourer suivant vos besoins.

Cette nouvelle étape va requérir des compétences techniques, deux cas peuvent alors se présenter :

  • Ces compétences existent en interne chez les maîtres d’ouvrage. Parfait, vous n’avez plus qu’à vous lancer. C’est souvent le cas des collectivités publiques avec leurs services techniques par exemple.
  • Si elles n’existent pas en interne, il ne faut pas hésiter à solliciter des bureaux d’étude, pour les phases d’études et même certains artisans qui ont déjà des réalisations à leur actif ou certaines entreprises qui proposent des offres pour mettre en œuvre l’accessibilité comme la vôtre (*) par exemple qui propose un packaging pour réussir cette phase de mise en œuvre.

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Conseil N°2 :  consultez les usagers de votre ERP !

Vous avez priorisé des actions et travaux de mise en accessibilité dans le calendrier de votre Ad’AP, c’est une 1ère pierre à votre méthodologie. Cette dernière aboutira sûrement à des référentiels de mise en accessibilité des bâtiments à traiter et d’autres outils. Il est essentiel de mener ce travail en partenariat avec les usagers. J’entends par usagers, les personnes handicapées bien évidemment, mais aussi tous les autres usagers des sites pour s’assurer de la meilleure accessibilité pour tous de l’ERP en question.

Conseil N°3 : ne cherchez pas à faire de l’accessibilité pour de l’accessibilité !

En tant que maitre d’ouvrage vous délivrez des services et/ou des biens qui se doivent d’être accessibles à tous. Aussi, adoptez une démarche globale. Commencez par une analyse fonctionnelle, la démarche d’accessibilité n’en sera que plus facile à imaginer et à mettre en œuvre. L’idée est bien d’intégrer l’accessibilité pour chacune des fonctions de l’établissement.

Ensuite armez-vous de votre G.B.S. préféré, (Gros Bon Sens) constitué de pragmatisme et recherchez les meilleures solutions. Ne négligez pas une solution d’organisation spatiale, qui fait finalement partie des « actions d’accessibilité », par opposition aux « travaux d’accessibilité ». Une telle solution ne nécessite souvent en effet pas de travaux colossaux.

Conseil N°4 :  formez vos équipes !

N’oubliez pas après tous ces efforts la nécessaire formation du personnel en contact avec le public, en particulier à l’accueil de personnes handicapées. Ce serait dommage de s’être tant investi dans les travaux pour ensuite être confronté à un bad buzz lié au manque de formation du personnel.

Cette formation doit certes être initiale mais doit aussi faire l’objet d’une révision, de rappels au fur et à mesure des mouvements de personnel et de l’évolution des usages dans votre ERP.

spécialistes accessibilité-okeeneaLa filière accessibilité s’est structurée ces dernières années, des fabricants, des bureaux d’études se sont spécialisés, quel rôle ces acteurs doivent-ils jouer dans cette nouvelle étape ?

Je le redis nous avons besoin de compétences techniques mais pas seulement ! Tout d’abord il faut réfléchir aux fonctionnalités de l’établissement. Quels sont les biens et les services délivrés et comment permettre à tous d’y avoir accès ?

Ensuite il faut aller chercher les compétences techniques là où elles se trouvent, les mettre en synergie. Je ne souhaite pas laisser entendre que l’accessibilité serait l’affaire de spécialistes, je préfère dire que l’accessibilité est l’affaire de chacun. L’accessibilité doit être avant tout le « problème » de celui qui délivre le bien ou le service afin qu’il se l’approprie. L’atteinte de cet objectif passe par la responsabilisation, la formation et la sensibilisation des maîtres d’ouvrage. En revanche, il faut savoir s’appuyer sur des professionnels qualifiés pour aller plus loin dans la réflexion initiale du maître d’ouvrage ou du gestionnaire de l’ERP, et l’expertise de fabricants, de bureaux d’études, d’artisans et d’entreprises qui se sont spécialisés dans ce domaine est irremplaçable.

Pour résumer c’est au moment de la mise en œuvre et pour transcender sa démarche que le maître d’ouvrage devra faire appel aux spécialistes qui existent dans les bureaux d’études, les services techniques, les entreprises, les professionnels, architectes, urbanistes…, lesquels sont formés et aguerris aux aspects techniques de l’accessibilité.

Quand chacun se sera approprié les raisons de l’absolue nécessité de l’accessibilité, on saura d’autant mieux décrire et fixer le résultat à atteindre. Les solutions techniques viendront alors d’elles-mêmes et seront mêmes plurielles. C’est d’ailleurs l’objet des « solutions d’effet équivalent » décrites dans l’arrêté du 8 décembre 2014.

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Les solutions d’effet équivalent, pouvez-vous nous en dire plus ?

L’Ad’AP est réalisé sur la réglementation en vigueur au moment de sa rédaction. Cependant, les travaux de mise en accessibilité étant par définition réalisés à une date postérieure, ils doivent respecter la réglementation en vigueur à ce moment-là. Il y a donc des chances que les maîtres d’ouvrage soient obligés de revisiter les préconisations mentionnées dans leurs diagnostics et/ou Ad’AP.  De plus si la réglementation évolue, la technique et les usages évoluent également et il faut également les prendre en compte.

C’est dans cette optique qu’a été rédigé l’arrêté du 8 décembre 2014 : pour ne plus avoir une réglementation toujours plus volumineuse et… en retard. Le concept de solutions d’effet équivalent redonne de la souplesse pour la mise en œuvre en se basant sur l’obligation de résultat et non plus de moyens, ce qui permettra d’ailleurs d’utiliser des moyens pas encore normés mais qui permettent d’atteindre le même objectif.

Ce concept est d’autant plus intéressant que notre réglementation et nos normes sont déjà très fournies, voire complexe en termes d’imbrication. Finalement, cela rebute et donne une image complexe de l’accessibilité. Les solutions d’effet équivalent apportent des alternatives pour répondre aux besoins du maître d’ouvrage.

Du reste, « le marché » de l’accessibilité est très innovant, il serait dommage de se passer de cette richesse.

(*) EO GUIDAGE du groupe OKEENEA

Si le bilan des dépôts des Ad’AP est positif, il reste maintenant le chantier de la mise en œuvre. Les professionnels de l’accessibilité sauront vous accompagner pour optimiser votre projet en vous assurant d’être au fait de la réglementation en vigueur et en respectant l’usage. Vous avez envie d’échanger ? Nos équipes sont à votre écoute, vous pouvez nous contacter ! Conseil, équipements et mise en œuvre de solutions d’accessibilité sont notre quotidien depuis près de 25 ans ! 

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Mis à jour le 29 décembre 2021 / Publié le 17 novembre 2016

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Lise

Créer une culture commune entre tous les acteurs engagés pour rendre la ville et ses services accessibles à toutes les personnes qui vivent avec un handicap, c’est ce qui m’anime au quotidien !